"Vers une société planétaire constituée de trois classes ?
J. ATTALI : La deuxième tendance majeure du XXIe siècle concerne les nouvelles technologies. Elles conduisent à deux phénomènes contradictoires : la connexité et la solitude.
La connexité, terme que je préfère à ceux de mondialisation ou
de globalisation, c'est l'interdépendance dans l'espace et dans le temps. Mais cette connexité n'est pas incompatible avec la solitude. On sera de plus en plus interdépendant, mais de plus en plus solitaire dans cette interdépendance : la mondialisation sera une juxtaposition de solitudes connectées. Ce qui m'amène à penser que la technologie conduit à la naissance de trois groupes sociaux, tant à l'intérieur de chaque pays qu'à l'échelle planétaire :
Premièrement, l'hyper-classe : groupe composé de plusieurs dizaines de millions de personnes, qui disposent de tous les moyens de la connexité et de la création, qui créent et qui manipulent les informations, qui sont des nomades volontaires, et se trouvent dans une situation d'individualisme exacerbé.
Deuxièmement, les nomades de misère, un groupe d’environ 1 milliard d'individus, qui au bas de l'échelle, subissent les technologies et sont obligés de bouger pour trouver du travail ou pour survivre.
Troisièmement, tout le reste, une gigantesque classe moyenne, vivant dans l'espérance factice de rejoindre l'hyper-classe et dans la peur réelle de basculer dans le nomadisme prolétaire. Cette classe moyenne vivra dans le spectacle donné par les nouveaux moyens de communication : spectacles et distractions vont devenir plus que jamais des industrles majeures, car si la réversibilité et la précarité deviennent la règle, ilfaudra le faire oublier pour que l'ordre social soit maintenu. La distraction sous toutes ses formes - jeux, loisirs, fêtes, sports, religions (au sens de la multiplication des sectes), cinéma, voyages dans l'espace et dans les drogues - deviendra absolument vitale pour maintenir l'ordre social."
Cf: Tittytainment
In English:
"Towards a planetary society of three classes?
J. ATTALI: The second major trend of the 21st century concerns the new technologies. They lead to two contradictory phenomena: connectivity and solitude.
Connectivity, a term I prefer to those of globalization, is the globalization, is interdependence in space and time. But this connectivity is not incompatible with solitude. We will be more and more interdependent, but more and more solitary in this interdependence: globalization will be a juxtaposition of connected solitudes. This leads me to believe that technology is leading to the birth of three social groups, both within each country and on a planetary scale:
First, the hyper-class: a group composed of several tens of millions of people, who have all the means of connectivity and creation, who create and manipulate information, who are voluntary nomads, and are in a situation of exacerbated individualism.
Second, the nomads of misery, a group of about 1 billion people, who at the bottom of the ladder, suffer from technologies and are forced to move to find work or to survive.
Third, the rest, a gigantic middle class, living in the false hope of joining the hyper-class and in the real fear of falling into proletarian nomadism. This middle class will live in the spectacle given by the new means of communication: spectacles and distractions will become more than ever major industries, because if reversibility and precariousness become the rule, it will be necessary to make people forget it so that the social order is maintained. Distraction in all its forms - games, leisure, parties, sports, religions (in the sense of the multiplication of sects), cinema, travel in space and in drugs - will become absolutely vital to maintain social order."
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